Saint-Didier-d’Allier

Au mois d’août, Serge et moi sommes allés à Saint-Didier-d’Allier. Ce village se trouve entre Pont d’Alleyras et Saint-Privat-d’Allier sur la route départementale 40. Cette route que mon père empruntait pour me conduire au lycée du Puy  où j’étais pensionnaire, les lundis neigeux, lorsque l’itinéraire habituel qui passe par Saint-Jean Lachalm était impraticable à cause des congères… Depuis fort longtemps, je n’avais plus pris cette route. Elle est étonnante : en regardant par la vitre de la voiture, on a une vue plongeante et fascinante sur l’Allier en contrebas.

La dernière fois, c’était il y a bien vingt-cinq ans. L’ingénieur de la DDE du Puy qui désirait me rencontrer pour obtenir une autorisation de travail de voirie près du moulin, m’avait fait visiter la route menant à Saint-Didier, les travaux effectués par les agents de la DDE sur les ponts rencontrés en chemin : pierres maçonnées et agencées avec soin, joli boulot d’appareillage tout en finesse et goût, vrai travail de pro. Nous nous étions arrêtés vers Saint-Didier pour cueillir des violettes. C’était le printemps.
C’est cette route, au-delà de Gourlong, ancien village de templiers, qui conduit au barrage de Poutès puis à Saint-Didier-d’Allier. D’abord plate jusqu’au barrage, elle serpente au fil des lacets bordés de chênes et de merisiers en montant à l’assaut de la pente montagneuse. On voit sur l’autre versant les chiers de pierres volcaniques, vastes éboulis  dégoulinant en cascades vers la rivière.
Au hasard d’un virage, le panneau routier indique que nous sommes arrivés à destination. Le village d’abord dérobé à la vue, se laisse peu à peu découvrir au fil des sinuosités du chemin. Une grande ferme à droite, suivie au-delà, sur le tranchant de la colline, d’un hameau dont les bâtisses s’échellent progressivement. Quel émerveillement ! Nous descendons, barreau après barreau, la pente qui s’abaisse vers l’Allier. Les maisons de pierres de pays couvertes de tuiles romaines attirent notre regard abasourdi par tant de beauté.  Bâties sur l’éperon rocheux comme en encorbellements, elles font saillies sur la pente . On dirait de cette féérie » villagière » qu’elle sort par enchantement de nulle part.
Le village perché sur une arrête du rocher, s’accroche  sur la pente d’un cratère creusé dans la montagne : toutes en dénivellations, en terrasses, en étages, les bâtisses et leur coin herbeux s’agrippent à la pente ou l’escaladent -c’est selon -, posées par la main de l’homme, bâtisseur de cathédrales incroyables : une émotion esthétique rare ! Site digne d’être classé dans les villages remarquables de France !
Marie Josée et Christian Didion nous attendent dans leur maison aux volets verts ouverte sur la pente du cratère d’où la vue est imprenable : un paysage semi-circulaire de forêt étagée que les couleurs d’automne doivent sublimer. Christian consacre ses matinées à édifier des murs de soutènement au bas desquels le couple dispose des arbustes et plantes : céanothe, pourpier, menthe, iris…
Juste à côté de leur maison, le château ou plutôt la maison forte dominée par le toit polychrome du pigeonnier. En face de chez les Didion, un bac d’eau qu’alimente une source apporte une note de fraîcheur à cet été si chaud et écrasé de soleil.
Le village descend vertigineusement sur l’Allier d’un côté. Là, une série de maisons dont certaines ruinées qu’un Grec a rachetées – « pour n’avoir pas de voisins ». Des décombres d’une maison écroulée sortent des arbustes que l’été aride a desséchés. En bas, la rivière poursuit sa course inexorable sans broncher.
D’un autre côté, le village s’abaisse vertigineusement pour conduire jusqu’à une petite chapelle à peignes.

Voir Saint-Didier avant de mourir !

Septembre 2016