Gilbert fait revivre le temps d’une page, Alice et Berthe Peyron, deux sœurs qui habitaient autrefois Pont d’Alleyras et qu’il rencontrait sur le chemin de l’école.
« Je longe l’école, admire la gare et ses environs et me retrouve devant la petite maison des deux vieilles filles. C’est presque une chaumière avec son jardinet. Elle se tient là, à mi pente sur ce chemin qui rejoint la route.
J’embrasse Cette campagne. Je hume toutes les senteurs que la nature m’offre. Je revis sur ce parcours que j’ai tant emprunté.
Les deux sœurs s’appelaient Berthe et Alice. L’une d’elles était factrice de remplacement, ce qui lui permettait d’améliorer les fins de mois.
Elles vivement pauvrement dans leur semblant de ferme et n’avaient que deux vaches et très peu de terre. Une de leurs Aubrac s’appelait Damette et avait des humeurs. Je me souviens qu’un soir, en rentrant de l’école, elle m’a poursuivi, ce qui m’a valu de courir vite et de sauter à la hâte la clôture de fils barbelés du pré voisin pour échapper à ses caprices.
De l’autre côté, une fois en sécurité, j’ai pu compter mes égratignures.
Leurs deux chiens, Poupette et Finaud, n’arrivaient même pas à faire obéir cette vache, malgré leurs aboiements et morsures, tellement madame était têtue.
J’appréciais ces deux paysannes qui, dans le silence de leur vie, entretenaient leur lopin de terre.
Leur maison les a gardées jusqu’à leurs derniers soupirs.
De leur bien, il ne reste que le frêne qu’elles avaient planté au bord de leur jardin et qui lui rappelle leur souvenir en embrassant de ses grandes branches la façade de la nouvelle maison. »
Gilbert Boudoussier
Janvier 2017