Les jardins de Colette

Il y a déjà quelques temps, le jardinier Serge G. m’avait envoyé des documents que j’avais laissés en attente. Je les ai mis ce jour de début juin en chantier.

Serge était parti en Corrèze voir les jardins de Colette, un mélange de botanique et de littérature, un concept unique pour une romancière hors du commun.
Colette, « La Dame du Palais-Royal », connue aussi bien pour son caractère entier que pour son amour de la nature et des animaux, était également un écrivain au talent incontestable. Elle est l’auteur du célèbre roman « Claudine à l’école ». Claudine, l’écolière impertinente a vu le jour sous sa plume en 1900 et la suite de ses aventures gardera en haleine le lecteur (trois romans lui succéderont). Pour ma part, son recueil « Sido », un hymne à sa mère, est l’un de mes livres préférés.
Aujourd’hui, Les Jardins de Colette, situés à proximité du château de Castel-Novel à Varetz (où elle vécut une dizaine d’année avec son second mari Henry de Jouvenel), invitent leurs visiteurs à plonger dans l’univers de cette grande romancière du XXème siècle. Un univers, parait-il,  où les fleurs, les jeux et les mots s’entremêlent, un univers unique pour découvrir d’une manière ludique et inédite, la nature qui nous entoure ! Du jardin de son enfance en Bourgogne jusqu’aux Jardins du Palais Royal où Colette termine sa vie, c’est un véritable tour de France qui est proposé.

Six jardins clos représentent les six régions de France où Colette a vécu. Ainsi chaque jardin offre un paysage différent dans un savoureux mélange de littérature et de botanique.

Découverte des six jardins
1. Le jardin d’enfance de Bourgogne (1873-1891) :

« Un jardin où l’on peut tout cueillir, tout manger, tout quitter et tout reprendre ».
Les dates clés :

- 28 janvier 1873 : Naissance de Sidonie Gabrielle Colette
- 1891 : Colette quitte sa Bourgogne natale

Une belle glycine bleue, une des fleurs préférées de Colette, court sur l’enceinte de fer forgé qui clos cet espace. Elle reprend la glycine du jardin de Saint Sauveur en Puisaye, le jardin de son enfance où l’amour de Colette pour la nature lui est transmis par sa mère, Sido.
Les parterres de ce premier jardin sont entourés de charmes. On y froisse les feuilles de la sauge ananas et on retient la Rhazya orientalis, une apocynacée bleu porcelaine en fleur dès le mois de mai.

2. Le jardin sauvage de La Franche-Comté (1900-1905) :
« Le paon du jour… se pose, interroge chaque fleur, muse, s’enivre sur le chanvre rose, perd toute prudence,  se laisse saisir entre deux doigts ».

Les dates clés
:
- 1893 : Mariage de Colette et Henry Gauthier-Villars (Willy)
- 1900 : Parution de « Claudine à l’école », premier ouvrage de Colette qui sera signé par Willy.

Nous entrons dans un jardin de sous-bois où les conifères prédominent : sapins, cyprès chauve ou taxodium distichum, un des rares conifères qui roussit à l’automne avant de perdre ses aiguilles. Les lupins et les bruyères transforment cette sapinière en un beau bosquet fleuri.
Colette se plaisait beaucoup dans son Domaine des Monts Boucons en Franche Comté où elle jouissait d’un immense parc.

3. Le jardin du bord de mer de  Bretagne (1910-1927) :
« J’ai un perchoir de rocher entre le ciel et l’eau ».
Les dates clés :
- 1906 : Rencontre de Colette avec la Marquise Mathilde de Morny (Missy)
- 1910 : Achat du Manoir de Rozven (Près de St Malo)

Colette divorce et rencontre alors la Marquise de Morny (nom de scène Missy) avec qui elle achète le Manoir de Rozven près de Saint Malo.
Ce jardin se veut minéral avec le gravier, ses bancs et ses gros blocs en granit symbolisant les falaises bretonnes.
Les saules à feuille de romarin, salix rosmarinifolia, bordés d’une mer de stipas apportent une note très actuelle à cet espace. Quant au bleu des nombreuses verveines de Buenos Aires, Verbena bonariensis, il doit être du plus bel effet en été au pied des murs de granit.
Pinus nigra, Quercus ilex (chêne à feuille de houx), et différentes variétés d’eryngiums (chardons) complètent le tableau.

4. Le jardin verdoyant de Corrèze (1911-1923) :
« Bel Gazou, fruit de la terre limousine ! quatre êtres et trois hivers l’ont peinte aux couleurs de ce pays… »
Les dates clés :
- 1912 : Mariage de Colette avec Henry de Jouvenel
- 1913 : Naissance de Colette de Jouvenel, dite Bel-Gazou

Colette rencontre, Henri de Jouvenel, rédacteur en chef du « Matin » et découvre avec lui la Corrèze et le  château de Castel Novel où ils élèveront leur fille « Bel Gazou » dans un univers proche de la nature.
Cet espace aux grandes étendues verdoyantes et aux chênes centenaires est ouvert sur la campagne corrézienne.
Les rangées de saules recépés s’alignent à l’infini : Salix alba, Salix caprea, Salix fragilis…
(Dés 1880, les paniers en osiers étaient largement utilisés pour expédier les fruits et légumes du Limousin vers Paris, Londres, Bruxelles…)

Un long chemin de galets évoque les bords de rivière où Colette aimait marcher pieds nus…
Ici le poulailler et les jeux de plein air, mikado et dominos géants évoquent l’enfance de Bel Gazou.
Autre lieux cher à Colette en Corrèze, le château de Curemonte, propriété de sa fille.

5. Le jardin sensoriel de Provence (1926-1938) :
« Je sais maintenant ce qu’est le jardin provençal : c’est le jardin qui n’a jamais besoin pour surpasser les autres, que de fleurir en Provence ».
Dates clés :
- 1925 : Rencontre avec Maurice Goudeket
- 1926 : Achat de « la Treille Muscate », (Près de St Tropez)

Vigne, tamaris, buddleias, lavandes, oliviers, figuiers, cyprès, pins parasols signent ce jardin provençal. Quant aux crocosmias, hémérocalles et agapanthes, ils ravivent le tableau.
Une roseraie fait référence à l’amour de Colette pour les roses et tout particulièrement pour la rose « Cuisse-de-Nymphe » mise en avant dans le jardin. Une rose porte le nom de Colette ; elle est en vente dans la boutique.
Devant la fontaine, les pots bleus et la longue allée orangée, on ne peut s’empêcher de penser aux Jardins de Majorelle. Cet espace renvoie aux nombreux voyages que Colette effectua : le Maroc, New York…

6. Le jardin à la française du Palais-Royal (1838-1954) :
« Obstinée à mon Palais Royal comme un bigorneau à sa coquille. »
Les dates clés :
-1938 : Acquisition de l’appartement tant convoité qui lui offre une vue sur les jardins du Palais-Royal
- 1949 : Colette est élue présidente de l’Académie Goncourt

Elle vit ses dernières années en plein cœur du Palais Royal à Paris. De sa fenêtr, elle admire les allées de tilleuls (Tilia cordata) ainsi que les parterres de vivaces bleues, blanches, rouges et jaunes.
Dans le long parterre rectiligne, des chardons qu’on pourrait tout d’abord prendre pour des aloes ou des agaves, attirent l’attention : ce sont des eryngium agavifolium.

Juin 2017


Cette entrée a été publiée dans Jardins et biodiversité. Vous pouvez la mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à Les jardins de Colette

  1. Alice dit :

    Je ne savais pas qu’elle avait vécu dans le chic…

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>