Ces crustacés que je voyais et pêchais au bord du Malaval, sous le moulin abondaient jusqu’aux alentours de 1970.
Mon oncle André avait construit une passerelle qui enjambait ce ruisseau pour le traverser et se rendre dans le pré d’en face. Elle existe toujours aujourd’hui mais elle est régulièrement restaurée. André m’avait chargée de peindre sur une pancarte placée devant celle-ci : PROPRIÉTÉ PRIVÉE PASSERELLE INTERDITE. Il avait justifié ainsi cet avertissement : « Les gens sauront ainsi qu’ils y passent à leurs risques et périls et nous nous dédouanons de toute responsabilité au cas où… »
Néanmoins, le Toine nommé Antoine Savy y passait pour se rendre à son jardin ainsi que quelques autres personnes. Sinon, il aurait fallu qu’ils passent sous le pont en pierres de la route et ce n’est pas commode car il faut marcher dans l’eau.
Madame Chanal et ma mère venaient y faire leurs lessives. Ma mère suspendait son linge sur des fils tendus, Paulette Chanal les étendait au soleil sur le pré. Je me souviens bien des grands draps étalés sur l’herbe et retenus aux quatre coins par des pierres. Elle m’avait expliqué que les rayons du soleil les blanchissaient.
Les enfants que nous étions marchaient dans le ruisseau avec nos chaussures en plastique à la recherche de vers d’eau et d’écrevisses. Avec mon oncle André, nous y placions des balances qu’on appâtait de viande pour récolter quelques écrevisses. On les plaçait sur le lit du ruisseau, tout près de l’endroit où les femmes venaient laver le linge. Mais ces crustacés natifs ou indigènes de nos régions ont disparu. Ont été incriminées l’arrivée des espères très invasives venues d’Amérique, le pollution de nos cours d’eau, une maladie… On en trouvait surtout dans le ruisseau appelé le Gourlong.
Les écrevisses marchent à reculons et obliquement sur le fond du lit de la rivière.
Petite et en compagnie de Serge Fournier, je les saisissais par leur carapace ente le pousse et l’index et les sortais de l’eau par jeu. Elles remuaient alors leurs pattes munies de pinces dans le vide. Notre jeu consistait à les brandir au-dessus des femmes à genoux, occupés à leur lessive.
Ma grand-mère les cuisinait en les plongeant dans l’eau bouillante et, une fois cuites, elles étaient toutes rouges.
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Février 2015