Poutès et Douchanez

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Un des chapitres de Partitions de mes Montagnes et Vallées de Gilbert Boudoussier raconte une de ses escapades en famille chez des cousins, à une encablure de Pont d’Alleyras…

« Le château de la Baume se mire dans les eaux du barrage de Poutès, depuis ce versant de l’Allier aux forêts giboyeuses. Ces eaux calmes, noires et profondes, silencieuses et inquiétantes, cachent bien des secrets.
Sur cette surface livide s’ébattent les poules d’eau. Ma rivière Allier, ô combien poissonneuse ! Cette retenue d’eau a donné tant d’espérance pour les emplois créés mais aussi beaucoup de désespoir pour le village englouti.
Ce lieu aux eaux troubles et mythiques m’attirait. J’ai souvent entendu dans les conversations de la commune, des histoires sur ce barrage. Sur la route de Poutès dite du Lombard (que j’avais appelée route du gui dans mon premier livre), cette départementale que j’ai parcourue par tous les temps, à pied, à vélo ou en mobylette, est toujours présente dans ma pensée et dans mon cœur sensible. J’ai constamment gardé un regard attentif et captivé sur  ces eaux calmes.
Entre cette route et la rivière, serpente la voie ferrée Paris-Nîmes qui s’accroche à la colline et qui accompagne sur quelques kilomètres le barrage et la ligne entre Alleyras et Poutès.
Il m’arrive encore de m’arrêter sur le bord couvert de serpolet avec le même émerveillement qu’en mes jeunes années. Mon regard se noie dans cette étendue d’eau et se perd dans les solitudes boisées aux différents tons de vert en été et d’ocre au retour de l’automne. Forêts flamboyantes au soleil de la saison finissante !
Je connais, bien cachés dans les feuillages, les villages des Chastres et de Douchanez ainsi qhttp://ladraio.free.fr/allier/_wp_generated/wp4c7550a9.jpg
que la Chapelle de Saint-Étienne. Voici de part et d’autre des photos des Chastres.
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Mon regard, comme attiré, se perd à nouveau dans les eaux du barrage.
Je me souviens, lorsque nous allions à Douchanez à pied avec papa, maman et ma petite sœur Colette. Nous prenions cette route et, lorsque nous arrivions au village de Poutès, la frayeur s’emparait de nous en regardant les eaux frémissantes et coupables.
Papa était très loquace à chaque passage et ne se lassait pas de nous raconter des anecdotes tristes ou gaies concernant son premier emploi. Nous traversions lentement la barrière qui était toujours peinte aux couleurs de la S.N.C.F., rouge et blanche. La garde-barrière venait juste de remplir deux cruches d’eau en fer blanc de cette eau pure et claire au goût de la montagne. Le puits se situait à quelques centaines de mètres seulement. Cette dame nous accueillait gentiment, à la manière des gens du pays, et nous restaurait un peu. Elle offrait à maman un bon café. Mon père se désaltérait un d’un ou deux verres de vin frais venu de la cave. Pour nous, les enfants, c’était un sirop  de citron, fraise ou grenadine fortement coloré . Elle nous parlait de sa fontaine  qui se trouvait au bord de la voie et où il fallait actionner une imposante manivelle. Un simple mécanisme amenait l’eau qui coulait en chantonnant dans les récipients. Ce liquide puisé au plus profond de la terre nous venait de l’offrande du Dieu des eaux.
Une roue au sommet du puits et une autre au fond étaient reliées par une chaîne à godets couleur cuivre. Cette eau fraîche et la barrière fleurie égayaient merveilleusement ce paradis des gorges de l’Allier. Le sourire éclatant, sincère, le franc-parler de notre hôtesse en faisaient une personne attachante.
Voilà plus d’une heure que nous étions ici et mes cousins de Douchanez devaient attendre avec impatience notre visite.
Mais papa était intarissable sur la mémoire de ce village et nous racontait encore… C’était un beau hameau de Haute-Loire avec des terres limoneuses, entretenues par de braves paysans. Quelques petites fermes se groupaient au milieu des vertes prairies et des champs prometteurs. Lorsque les eaux sont basses, on aperçoit le creux du chemin bordé d’un mur vaseux. Découverte émouvante et chargée d’histoire. Combien d’attelages et de personnes sont passés ici ? Ces paysans empreints de leurs terres, de fierté, de respect et des immuables habitudes et coutumes de leurs villages ! Dans le groupe de fermettes, vivait un entrepreneur de battage qui possédait une scierie fonctionnant avec une locomobile Peccard (Nevers-France).
L’entreprise de l’époque était très active en toutes saisons mais surtout à l’automne, pour aller « escoudre » (1) et l’hiver, pour le sciage de beaux troncs d’arbres qui deviendraient des planches ou des solives odorantes, parfumées aux essences de pin ou de fayard (2).
Sa vieille batteuse « Brelloux, en livrée verte, ronronnait dans le haut Allier. Le panache de la locomobile s’est longtemps élevé dans le ciel de Poutès. Cette image s’est poursuivie jusqu’aux derniers passages des locomobiles à vapeur qui, elles aussi, lançaient de belles volutes de fumée couleur ouate ou ciel noir d’orage.
Monsieur Jean-Baptiste de Tissier était heureux de tout ce petit monde de travailleurs qui s’affairaient autour de son matériel, semblables à des abeilles autour de leur ruche. Bien positionnée sur ses quatre imposantes roues de fer, la  locomobile honorait son siècle. Tout allait pour le mieux. Les gerbes s’entassaient, bien rangées sur les chars à bœufs. La forêt proche fournissait du bois pour la loco et la scierie. Les granges croulaient sous le poids des gerbes et du foin. Tous les fruits de la terre, comme le disait le curé de la paroisse voisine, étaient amassés ici par ces braves paysans, avec tant de peine et d’orgueil ! Les pensées religieuses dictées par les angélus donnaient du répit à la scierie. C’était l’apogée du village grâce à ses métiers florissants.
André Chapelon, notre entrepreneur de battage, s’activait autour de sa rutilante locomobile pour qu’elle soit encore plus performante. Il vivait au rythme de sa machine et des saisons qui lui fournissaient son travail.
Cela faisait vivre une famille composée de sa femme Augusta et de ses trois filles.
La loco soufflait et respirait comme son patron. Elle peinait aussi au cours de ces grandes campagnes de battage et des longues journées à débiter des planches. Parfois, il fallait deux paires de bœufs pour la hisser parmi les chemins à forte dénivellation. Ensuite, tout s’installait en bon ordre dans les cours des fermes. Une fois la presse à paille, la batteuse, la loco mises à niveau, et l’alignement de la courroie maîtresse pour relier tous les instruments réglé, le battage pouvait commencer.
La loco, déjà prête, donc en pression, ajustée avec la précision d’une horloge, pouvait se réveiller. Le va-et-vient des bielles,la vapeur qui s’échappait des purgeurs et le tic-tac régulier montraient qu’elles prenaient leur vitesse de croisière. Une à une, les buchettes se consumaient dans le foyer. Les trois boules d’acier tournaient à leur plus grande hauteur, ce qui signifiait que la conduite était bonne.
Notre machiniste vérifiait les manomètres de pression, satisfait de toute sa mécanique. De temps à autre, le sifflet strident venait troubler la routine et l’ordre du travail pour annoncer la pause ou le départ. Ce son aigu résonnait si bien dans ce coin de vallée du Haut-Allier qui n’avait pas encore été victime de ce maudit barrage.
Les jours d’automne, l’attelage circulait péniblement, lentement, dans les chemins caillouteux pour s’installer dans tous les villages à la manière d’un petit cirque.
Jusqu’aux dernières journées automnales, les scènes de battage se succédaient. Dès que s’acheminait l’hiver, la fin de période de battage terminait le passage du lourd convoi des moissons. Notre belle locomobile aux cuivres étincelants jaunes et rouges, entretenue avec passion, serait chez elle à l’abri dans son hangar.
La grande idée de la retenue d’eau commençait à se répandre dans les villages. La rumeur gagnait tout le département. Les discussions animées allaient bon train dans les cafés nombreux à cette époque. Les pensées s’assombrissaient à l’idée de la solution finale. Les quelques fermes devaient être abandonnées sauf celle de notre entrepreneur qui resterait car, seules ses terres seraient inondées. A côté d’elle, une maison serait construite qui servirait aux fonctions de garde-barrage.
Les habitants durent se rendre à l’évidence de la vente de tous leurs biens.
La belle habitation du conducteur de la locomobile resta en l’état, mais vide de ses occupants. Elle subsista cependant et revécut après tant d’années d’abandon. La batteuse alla s’endormir à Aussac pendant de longues années. Puis elle repartit pour Les Chastres où des agriculteurs s’en servirent pour les lentilles.
Quant à la locomobile, elle fut sortie de son sommeil un beau matin de printemps. Plus de vingt ans plus tard, elle repartit pour le département de la Lozère. Madame « Peccard » , née en 1900, subit une cure de jouvence. Bref, elle se refit une santé et un bon lifting pour soigner tous ses organes défaillants. Une autre vie commença pour elle après toutes ces années de léthargie, à croupir dans le vieux hangar humide au bord Du Gourlong. Elle renaquit pour les démonstrations du savoir-faire de son époque aux yeux des générations futures qui l’admireront.
Aujourd’hui, Poutès se meurt dans ses eaux croupies dont le silence ne fait qu’accentuer la solitude. Ce barrage a tout emporté dans ses profondeurs.
Les écologistes d’alors et leurs ardents défenseurs plaidèrent la cause de la suppression du barrage. Il empêchait la migration des saumons pour aller pondre aux frayères du pont de la Gardille tout près de Langogne. Les terres fertiles et la vallée furent à jamais perdues. Rien n’y fit. Les travaux commencèrent en 1940. Ce chantier dangereux embaucha une forte main d’œuvre étrangère qui n’était pas du goût de tout le monde.
Souvent, des rixes éclataient les soirs de paie dans les bistrots du village. Ces hommes avides de travail et d’argent, ces travailleurs, pour la plupart au langage cru et grossier, avaient un comportement primaire. Ils n’étaient pas tous comme cela, heureusement. Je me souviens que papa me racontait ses débuts de mousse(2) dans cet étrange milieu avec Jean Cour, son camarade de classe et d’autres du pays d’Alleyras. Ils étaient une équipe de copains, assidus, durs à la tâche et ripailleurs(3) certains soirs après leurs journées de dix à douze heures. Le coup de corne annonçait le départ et la fin du travail. L’atmosphère et les cadences de l’usine au grand air étaient pénibles dans l’abondante poussière étouffante. C’était pourtant là, dans cette poudrière, à coups de pioche, de barre à mine et d’explosifs qu’ils ont creusé les entailles dans la colline pour les ancrages du barrage et les tunnels. Certains laissaient leur santé et leurs forces dans ce travail de bagnard. Le chantier dura et employa une main d’œuvre abondante du pays. Papa et mon oncle Gustave faisaient leurs premiers pas dans le travail. Ils appréciaient ou subissaient les premières expériences et leçons de toute cette collectivité locale et étrangère. Les bonnes et mauvaises rencontres, les fins de mois avec en poche sa paie durement gagnée, tout était nouveau. Les petits bals malfamés et d’autres plus organisés permettaient d’oublier et de noyer tout cela. Si les hommes avec beaucoup de travail, en revanche, les fêtes étaient largement arrosées. Il n’y eut que deux accidents mortels dans cet immense chantier.
Papa n’arrêtait pas de me raconter son barrage de Poutès en me montrant ça et là les ruines des baraquements et les fondations de certains bâtiments de cantine ou cabanons d’outillage. Cet enfer pour travailleurs me fait penser au livre Germinal d’Émile Zola dont papa porte le prénom. Parfois, ses yeux se voilaient ou de gros éclats de rire éclaircissaient son visage. Papa avait beaucoup d’expression et d’humour. Tout n’était pas si mauvais comme il se plaisait à le dire.
Toute sa vie, il a parlé de cette période fastueuse de sa jeunesse travailleuse dans son pays. Son éloquence était intarissable. Maman nous précisa que cela faisait deux heures que nous l’écoutions en suivant son visage perdu sur les eaux du barrage et la forêt des alentours.
La visite chez la gentille garde-barrière et les histoires autour de ce barrage nous ont pris du temps sur la montre et mes cousins de Douchanez devaient nous attendre.
Nous avons allègrement franchi l’autre versant de la montagne pour les rejoindre. Le chemin herbeux, parsemé de roches, se frayait un passage entre la grande coulée de terres basaltiques et les nombreux arbres. Il grimpait sur le plateau de Ramenac. Là, les chiens nous guettaient et nous recevaient à grand renfort d’aboiements agressifs. Nous fumes obligés de les repousser tellement ils étaient hargneux. La traversée du groupe de maisons fut plus sereine. Les quelques habitants de ce pays perdu dans les forêts domaniales nous reçurent avec de grosses poignées de main chaleureuses. Pour nous donner quelques forces supplémentaires, ils nous invitèrent à leur table pour partager le verre de l’amitié. Nous bavardâmes un peu, et prîmes la route pour Douchanez.
Le chemin qui part du croisement de Fontane, juste après les Chastres, nous amena enfin chez les cousins et la cousine.
Après le virage qui nous fit sortir du bois, nous aperçumes dans une sublime géographie, la chapelle de Saint-Étienne qui est adossée à son rocher surplombant la vallée magnifique, sauvage et boisée du Lombard. Elle nous fit signe et nous appela à la paix du site pittoresque en nous invitant à un recueillement religieux car maman était très croyante. Son toit de tuiles rondes et rouges donnait un cachet au décor montagneux. Elle ressemblait quelque part à ce paysage du midi de la France que les santonniers reproduisent si bien. Son pèlerinage se fête début août. De loin, nous aperçûmes, adossé à un autre éperon rocheux et dominé par le relais, le village tant attendu de Douchanez.
Nous voici enfin arrivés à l’entrée de la cour où René, Albert et Odette nous attendaient. Ils nous embrassèrent avec tant de gentillesse et d’amitié que nous en  fumes très émus. Ils nous ouvrirent leur porte et nous offrirent l’hospitalité. Nous nous assîmes sur les bancs de la vaste cuisine.
Nous étions si bien en famille ! Grand-père se trouvait au bout de la table et pouvait voir tous ses invités. Il chiquait du tabac gris et cela me gênait un peu. Il était imposant avec sa tenue de travailleur de la terre. Sa grosse moustache qui le caractérisait lui donnait un air sévère. Cet homme était pourtant plein de bonnes intentions pour nous tous bien qu’il ne nous rencontrât que de loin en loin.
Nous avons cassé la croûte avec un bonheur partagé et la convivialité des gens de la terre. La grosse couronne de pain de la semaine fut sortie du tiroir pour être posée sur la table, puis coupée en tranches généreuses. Nous partageâmes ce repas en un rituel sacré. Le saucisson à l’ail aiguisait nos papilles Les convives taillaient de belles tranches luisantes et graisseuses qui faisaient luire les lames des couteaux. Sur la table trônait la carafe en verre épais et ciselé dans son milieu; elle laissait entrevoir ce liquide des dieux qu’est le vin rouge. Les hommes s’en désaltérèrent. Quel plaisir de manger dans cette cuisine simple et naturelle ! Le fromage pleins d’artisons*, conservé dans une vieille caisse posée dans un coin de la cave, nous invita à la dégustation. Nous nous régalions.
Cette marche à pied nous avait creusé l’estomac. Notre gentille cousine qui ressemblait un peu à Sheila avec ses couettes, nous apporta une tarte aux pommes sortie du four. Nous l’appréciâmes  tous mais particulièrement, ma sœur et moi. Maintenant que nous avions pris des forces, nous allions rendre visite à l’immense étable.
Les nombreuses vaches venant des pâturages y trouvaient leur place sans se tromper. Nous gravîmes l’escalier vermoulu jusqu’à la grange qui était aux dimensions de l’étable; elle était pleine à craquer de foin et de paille; le mélange sentait si bon ! Nous longeâmes les armoires à grains que les rats visitaient un peu trop et nous voici dehors, derrière les granges.
Dans cette deuxième cour, nous nous retrouvions à l’abri car elle était située sous le rocher de l’ancien château. Nous discutâmes du temps qu’il faisait ou qu’il allait faire, des travaux des champs, du bétail et des jeunes veaux qu’il faudrait bientôt amener à Saugues ou à Costaros. Ces deux marchés locaux étaient intéressants mais, à ce moment-là, les cours n’étaient pas bons; il faudrait donc attendre un peu plus pour la vente et espérer de celle-ci car c’était le seul revenu de nos cousins.
Nous contournâmes la grande ferme pour nous retrouver sur la petite colline de l’ancien château où est installé le relai. Le village semblait minuscule, vu de là-haut. Mes cousins nous expliquèrent en nous montrant l’immense étendue de la propriété, que tout ou presque leur appartenait. Visiblement, ils étaient ravis de leur domaine. J’appelais leur bien : la Grande Terre.
Le Papet est mort en 1974. Sa silhouette hante encore les vieux murs de son estaou* ainsi que l’orée de son bois en bordure du grand champ qu’il surveillait souvent de la fenêtre de la cuisine. Ma cousine s’est installée très tôt dans le midi de la France. Mes deux cousins ont continué la ferme jusqu’à la retraite où ils sont arrivés chacun à leur tour.
Albert a longtemps gardé les moutons sur cette colline au relai de télévision. Il les soignait du mieux qu’il pouvait. C’était sa principale occupation, sa passion. J’aperçois encore sa silhouette sombre, coiffée de son béret noir, debout au milieu de son troupeau. C’était quelqu’un d’important, ce berger des temps anciens. Il savait deviner le temps qu’il allait faire le lendemain en se trompant très peu grâce à son savoir rural et à sa grande sagesse.
Son frère René gérait le reste de la ferme avec son troupeau de soixante dix vaches. Assis sur son tracteur, il était un brin fier et responsable en en bon chef d’exploitation. L’homme, sûr de lui, respirait la force tranquille, la maîtrise est assurée. Mes deux chers cousins que j’aime tant, étaient un peu seuls dans leur village haut perché.
La retraite, ils l’attendaient avec impatience; elle se cachait au coin des bois noirs du côté de Monistrol d’Allier. Un jour, portée par une feuille d’automne et la diligence du facteur, elle est arrivée dans leur maison en se glissant furtivement dans leur boîte aux lettres.
Aujourd’hui, comme leurs parents, ils admirent la grande étendue qui leur appartient, leur terre nourricière et sacrée de laquelle mes cousins ne se détacheront jamais.
Le village s’est doté d’une grande écurie à chèvres. Le Doux Chêne est le nom délicat que porte leur très bon fromage. La famille Dépale a su faire revivre le village grâce à sa ténacité, son opiniâtreté, son courage et son savoir. L’idée nouvelle et le tempérament de battante de cette famille est exemplaire. Qu’ils soient ici félicités et encouragés une fois de plus pour leurs produits de qualité ainsi que pour leur accueil chaleureux. Grâce à eux, le village de Douchanez au passé prestigieux revit.
J’aime ce pays de chèvres, de moutons et de vaches qui paissent en commun accord.
Joli regard poétique que je porte sur ces toits ocres, rouges, oranges avec toujours autant d’émotion qu’en mes jeunes années. http://douxchene.free.fr/douxchene.htm
Pendant que le progrès s’installe, le cachet reste. La modeste chapelle veille silencieusement sur le village et bénit les terres du son aigrelet de sa cloche qui domine ce paysage bucolique de son campanile.
Douchanez marque ici sa présence, taillé dans une anfractuosité du rocher. Ce petit groupement de maisons accrochées à la colline au Chastel disparu et à ses traditions, est le témoin du savoir de toutes ces familles qui y ont vécu et l’ont servi. Il m’appartient aussi un peu lorsque je me revois avec ma sœur et mes parents, débouchant du croisement d’où l’on aperçoit, niché au pied des rochers au bout de la ligne droite de la route. Magnifique village qui redore la France et la rend accueillante.
Douchanez sur son coteau où broutent les troupeaux de chèvres et de vaches dans les parcelles de prairies herbeuses, les pâtures aux plantes de montagne qui parfument les fromages en leur donnant ce goût personnel du terroir.
Mon imagination s’arrête ici au pied de ce vieux pin bordant la route. Je vois m’asseoir en m’adossant à son tronc d’où je contemple cette minuscule chapelle et d’où je noie mon regard dans les étendues vertes et boisées. Je ne partirai que lorsque je serai totalement imprégné du panorama, du silence, des clochettes du troupeau et du sentiment inestimable de bien être et de paix.
Ma pensée du jour, depuis un petit village d’Auvergne, Douchanez. »

(1) escoudre : battre à la machine.
(2) fayard : hêtre.
(3) mousse : celui qui assure la tournée pour la soif.
(4) ripailleur : fêtard.
(5) artisons : acariens du fromage, qui lui donnent du goût.
(6) estaou : maison en patois.

Gilbert Boudoussier
Décembre 2016

 

 

 

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