Confinement-déconfinement

Ce lundi 11 mai 2020, fin du confinement. La période de claustration commencée le 17 mars, soit presque deux mois avant, s’achève.
Cette étonnante parenthèse de quarantaine nationale et générale ne constituait pas du tout la même aventure selon qu’on vivait comme moi dans une petite ville de Haute-Loire, département à dominante rurale, dans une petite maison avec une cour pleine de fleurs, des plates-bandes arbustives, des plantes en veux-tu en voilà, en plein épanouissement printanier.
Et quand de plus, la région était très peu touchée par le virus.
Et puis, j’avais la chance de ne pas vivre seule mais en compagnie d’un conjoint et de trois chats.
En revanche,  la parenthèse devait être autrement difficile à subir pour les habitants de Saint-Denis enfermés dans de petits appartements sans balcon.
Depuis la lucarne de notre maison, je reconnais la chance dont mon couple et nos chats ont bénéficié.
Ce retrait passager du monde environnant ne m’a absolument pas coûté, bien au contraire.
L’aventure intime et passagère induite par l’événement constituait le renouvellement d’une précédente et ancienne équipée de plusieurs années durant lesquelles notre petite tribu vécut l’isolement sur un petite île aux antipodes de la France, sans cinémas, bistrots ni grands magasins, avec juste l’essentiel nécessaire nécessaire à la vie quotidienne. Nous y avons appris sans le savoir, la sobriété heureuse chère à Pierre Rabhi.
Déjà, deux ou trois jours avant ce fameux  11 mai libérateur, je ressentais par avance la nostalgie de ces heureux et paisibles cinquante-cinq jours d’ermitage. Ce lundi sonnait le glas de la tranquillité, du silence, des chants et des gazouillis d’oiseaux dans la cour que ne venait troubler aucun bruit parasite. C’était le royaume du silence.
Désormais, les bagnoles assassines pourraient recommencer à pétarader, à rouler à tout berzingue sur la route, à écraser les chats intrépides et libres comme l’est Léo, le greffier de la maison. Je le sais puisque j’ai retrouvé au bord du trottoir ma gentille Jaja, une jeune, jolie et affectueuse petite chatte écrabouillée par une saloperie d’automobile. Des années après, je n’ai toujours pas digéré le drame.

Je remonte maintenant au moment où cette pandémie est entrée dans nos vies.
C’était au mois de janvier. Nous avions décidé de réaliser quelques aménagements dans la maison. Clovis était là et les avait résolument enclenchés avec tout le peps que lui conférait sa jeunesse. Et puis acquérir une expérience de bricoleur habile dont il pourrait bénéficier lors de futurs travaux personnels le boostait.

Nous préparions le chantier dans les pièces du premier étage pour poser dans chacune d’elles du parquet flottant.
Nous n’écoutions que d’une oreille distraite les nouvelles diffusées à la radio. Elles répétaient qu’un virus décimait des Chinois de la région de Wuhan, virus dont les journalistes situaient la provenance du marché de Huanan.
La rumeur médiatique disait que les cas de contagion émanaient de chauves-souris consommées là-bas et plus tard, d’autres animaux sauvages dont des pangolins.
Nous avons donc posé ce parquet, les plinthes de bois, les barres de seuil clinquantes et  j’en ai profité pour faire du vide, ranger et nettoyer l’étage et bien davantage.
C’est toujours évasivement que nous écoutions les informations, focalisés par nos rénovations domestiques et nos occupations habituelles.
Le temps s’est poursuivi en travaux.
A mon grand regret, Clovis a quitté la maison le 15 février pour regagner Sarcenas dans le Puy-de-Dôme…
Puis, quelques jours plus tard, je rejoignais mon fils aîné à Bas-en-Basset pour trier et vider des affaires dans une maison dont il avait hérité ; ces quelques jours furent dynamiques et très agréables. Nous ne suivions les actualités que de loin et sans véritable attention, tant nous  étions affairés par notre besogne.
Puis, je suis rentrée au bercail. Fin des « vacances ».
La situation sanitaire est devenue au fil des jours de plus en plus préoccupante selon les médias qui rabâchaient en boucle la litanie funeste de la pandémie qui depuis la Chine avait émigré en Italie pour se retrouver en France, dans l’est et en Ile de France.
Jupiter a parlé de guerre, de confinement, d’état d’urgence …en mars 2020. La vie était suspendue. Pourtant, la veille de sa déclaration dramatisante, nous votions à Alleyras et dans tout le pays.
Ma pensée pataugeait entre ces deux contradictions : se mettre à l’écart de toute contamination et donc fuir les lieux de passage et de regroupement ou bien aller voter dans la mairie où se rendaient les électeurs de la commune. Un de mes amis d’enfance se présentait sur la liste électorale et mon mari et moi devions déposer deux bulletins dans l’urne puisque nous possédions outre notre propre bulletin de vote, une procuration chacun  de nos fils. Dans une petite commune rurale, quatre voix, ça compte. Gilbert a donc été élu, chouette !
Pourtant, le lendemain, Paltoquet 1er nous ordonnait de nous confiner chez nous.
Les rues étaient vides, les magasins fermés, les gens ne pouvaient plus sortir après s’être rués et avoir dévalisé les magasins d’alimentation le week-end précédent.
Mais le printemps lui ne le ne savait pas, et les fleurs commençaient à fleurir, le soleil brillait, les oiseaux chantaient, les hirondelles allaient bientôt arriver, le ciel était bleu, le matin se levait pus tôt.
C’était le renouveau de la nature, ma saison préférée.
Les jeunes devaient étudier en ligne et trouver des occupations à la maison, les gens ne pouvaient plus faire de shopping, ni aller chez le coiffeur ni nulle part autre que pour aller faire des courses alimentaires.
On nous annonçait que bientôt il n’y aurait plus de place dans les hôpitaux que   des gens continuaient de tomber malades
Mais le printemps ne savait pas, le temps d’aller au jardin arrivait, l’herbe verdissait et poussait, poussait.
C’était au printemps 2020.
Dans les circonstances extrêmes, on découvre le comportement des gens et plus largement du pays, de la nation et au-delà : la psychose, l’anxiété déclenchées chez et par une pléthore de mes contemporains. Ça fout la trouille.
Car en fait, les gens parlaient comme si 90% de la population était contaminée alors qu’il y a simplement en France ce  13 mai 2020 27 000 morts du fait du coronavirus et 140 000 contaminés pour une population de 67 millions d’âmes, soit 0, 0004% de personnes.
Dans le monde, on compte 300 000 morts, 4,3 millions de contaminés, soit 0, 000043% de la population de la planète.
Et quand le nombre de malades baisse quotidiennement, les médias ne parlent que de la deuxième vague, annoncée comme inéluctable.
Pendant ce temps, des gens chantaient depuis les balcons, applaudissaient les soignants à vingt heures tapantes. Des voisins parisiens jouaient à « questions pour un balcon ». Des initiatives réunissaient une rue, un quartier…
Et tous les mensonges et les imbécillités que j’ai pu entendre ! C’est fou ! Le masque proclamé dans un premier temps inutile par  nos dirigeants dominés par l’impéritie et les contradictions qui se comportaient paradoxalement en détenteurs de la vérité pour porter ensuite aux nues ce même masque !
Tous ces bobards pour taire l’incompétence et l’imprévision crasses de ce gouvernement de dilettantes.

J’ai tout de suite fait le lien avec Tchernobyl lorsque les médias nous avaient annoncé que le nuage n’avait pas franchi la frontière. Trente ans après, les Français sont toujours pris pour de gros connards ! Mais ils ne sont pas dupes. Attention au retour du bâton !
Lorsque la plèbe réglera ses comptes, gare à ces polichinelles de pacotille qui s’agitent à Matignon et à l’Elysée.
Je me souviens d’une phrase de Michel Rocard, qui était loin d’être un idiot : ‘’Toujours préférer l’hypothèse de la connerie à celle du complot. La connerie est courante. Le complot exige un esprit rare.’’ Méditons sur les détenteurs de la connerie que je vise ici.
Mais le printemps ne savait pas. Les oiseaux avaient fait leur nid, deux nichées successives s’étaient suivies dans le nid de notre cour, abrité par l’avancée du toit.

J’ose espérer que cet épisode rappellera à mes contemporains qui paraissent l’éluder, que oui, c’est ballot, mais c’est la vie : elle prend fin un jour. Tout le monde le sait depuis qu’il a l’âge de raison.
Accident de voiture, accident domestique, champignon vénéneux, mauvaise chute, épidémie, tabagie, alcoolisme, maladie, AVC, rupture d’anévrisme, infarctus, cyclone, tremblement de terre, ouragan, famine, excès en tous genres, irradiations, fanatiques religieux illuminés, frelons énervés, moustiques dengues, tout peut survenir et il est très rare qu’on choisisse le moment fatidique ni qu’on le passe le cœur léger et serein.
Chaque époque a sa croix à porter : pour mes grands-parents, ce furent les guerres mondiales. Pour ma génération, c’étaient la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, le sang contaminé, le SIDA, la maladie de Creutzfeldt Jacob, celle de la vache folle et j’en oublie.
Il n’empêche que la vie continue et elle n’est pas qu’un jardin de roses.

Contrairement à ce mois de mai où le muguet a fleuri avant la fin d’avril après les giroflées ravenelle aux couleurs de flamme, où les roses sont écloses  dans la cour avec quinze jours d’avance.
Il n’a pas gelé dans notre jardin quand les arbres fruitiers étaient en fleur. Nous aurons des fraises, du raisin, des pommes, des poires, des pêches, des groseilles, du cassis, des framboises. L’angélique est bonne à être cueillie.
La vie continue envers et contre tout.

Rien de nouveau sous le soleil de ce printemps.

Juin 2020

 

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Une réponse à Confinement-déconfinement

  1. Valisufav dit :

    Vive le confinement! Tout comme le déconfinement d’ailleurs.

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