L’abbé Henri Hugon

L’abbé Hugon (1869-1944) est né à Lafarre en Haute-Loire et décédé à Saint-Étienne dans la Loire. Il fut missionnaire apostolique et dominicain conseiller de différents papes.
Un de ses ouvrages a été réédité par l’édition du musée de Saint-Didier : Au Pays des Cévennes et Le tailleur d’habits ambulant.  Certains chapitres m’ont intéressée, ceux qui parlaient de chez nous.

Les Muletiers et les potiers
Les muletiers venaient de la basse Ardèche. Ils faisaient généralement le commerce du vin qu’ils transportaient à dos de mulet, dans des outres, qui pendaient de chaque côté des flancs du mulet. Ils venaient de Montpezat et Saint-Cirgues ou par Le Béage; mais le plus souvent ils suivaient la route qui d’Aubenas menait au Puy en passant par Cayres, Thuyets, Lanarce, Peyrebeille et Pradelles. En général, ils vendaient du bon vin du bas Vivarais et ils se contentaient d’un léger bénéfice. Ils voyageaient souvent plusieurs ensemble.Les marchands de teraille ou potiers venaient quelquefois de Brives-Charensac mais généralement, c’étaient des originaires d’Alleyras, Alleyras-aux-Ecuelles… selon l’expression reçue, petite commune des bords de l’Allier, entre Langeac et Langogne. Ces braves gens étaient potiers de père en fils et, comme ils ne trouvaient pas à débiter sur place leur marchandise, ils la transportaient au loin. Dans leur caisse on voyait, bien rangés, les pots à eau, les pots à lait de diverses dimensions, mais surtout les écuelles, ces fameuses écuelles en terre grossière, avec deux oreilles. Le prix de ces divers objets était peu élevé, et je me demande comment ces pauvres gens arrivaient à faire vivre leurs familles.
Et cependant ils étaient généralement pleins d’entrain et ils fredonnaient volontiers la chanson du potier ambulant, vieille chanson qui attirait les acheteurs et faisait oublier la fatigue.

 

 

I
Voici le potier qui passe,
Qui passe et qui repasse,
Et qui ne reviendra pas
Et qui ne reviendra pas.
II
Braves gens, regardez, le fardeau est lourd.
Et je le porte depuis plusieurs jours.
Achetez tous mes pots,
Mes grands et mes petits pots.
III
Achetez mes écuelles
Elles sont toutes belles.
La soupe y sera bonne
Elle plaira aux hommes.
IV
Les femmes s’y mireront;
Les enfants les casseront.
Et bon, et bon, et balali bonbon.

 

Peu de renseignements subsistent sur les potiers de Vabres qui poursuivirent pourtant  leur activité, pour le dernier en date, jusque vers 1929. Parmi les renseignements dont nous disposons, citons les notes de  M. Fontès qu’Ulysse Rouchon reproduit sans autre indication dans sa vie paysanne en Haute-Loire (tome I) ainsi qu’un article paru dans la revue « Racines » en 1981.
- La préparation de la pâte : La matière première était constituée par une terre glaise de couleur noirâtre originaire de Vabres et d’une terre rouge plus légère provenant de la Triougaira à Alleyras les Écuelles.  La préparation de la pâte s’effectuait sur un sol dallé : deux couches de terre noire et une couche de terre rouge, les trois d’égale dimension  pour une épaisseur totale de quinze centimètres. L’ « impastirairé » mélangeait ces couches en les foulant avec ses sabots en bois.
Afin d’obtenir un mélange parfait, la terre disposée sur un massif établi de bois était frappée en cadence par plusieurs ouvriers munis de lourds gourdins en chêne.
- Le modelage et la cuisson : Le modelage s’effectuait au moyen du tour dont Ulysse Rouchon donne une description : « Le tour comprenait un arbre vertical qui entrainait la table chargée d’une boule d’argile. Le mouvement giratoire était imprimé par la force d’inertie d’un volant (roue à quatre rayons) lancé au moyen d’une barre calée entre deux rayons et prestement enlevée dès que le volant avait acquis une vitesse suffisante » (op. cit., p. 57).
Les pièces de poteries étaient ensuite mises à sécher sur de simples planches placées dans un lieu ventilé puis vernies ultérieurement à l’aide de silicate.
Pour la cuisson, on utilisait des fours de forme cylindrique : « Dans la partie inférieure était aménagé le foyer. La sole du four en forme de grille permettait l’ascension de la chaleur jusqu’aux poteries, empilées en quinconces, les plus grosses au fond et le pied en haut » (Ulysse Rouchon, op. cit., p. 57).
- Le transport : L’auteur de l’article paru dans « Racines » donne quelques précisions sur le mode de transport des poteries : « Le transport se faisait à dos d’homme dans un appareil rectangulaire fabriqué en osier ou en noisetier. La partie principale était verticale et s’appuyait sur le dos du colporteur, l’autre partie faisant corps avec la première était horizontale et s’appuyait sur la tête garnie d’un coussinet en crin… Le transport par mulet se faisait aussi à l’aide de paniers ayant la forme d’un navire, des couches de paille de  seigle rigide comblant les vides entre chaque poterie ».
- La gamme de fabrication : L’abbé Hugon cite les fameuses écuelles ainsi que les pots à lait et à eau, ajoutons les saloirs, les assiettes, les enfumoirs, les épis de faîtage, les plats à barbe.

Un article paru dans Alleyras Capitale pour compléter tout cela : http://alleyras-capitale.info/?273-alleyras-vabres-marie-barnier-se

Juin 2016

 

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Une réponse à L’abbé Henri Hugon

  1. Danielle Rodde dit :

    Surement ils devaient chanter en patois. Je me souviens d’une expression railleuse pour désigner les habitants d’Alleyras: c’étaient les  » couffla pota dé Saviras  » ( gonfleurs de pots d’Alleyras) et les gens de St-Privas d’Allier c’étaient  » mandga couenla dé San-Privas » (mangeurs de couennes= lard, de St-Privas)

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